La loi Climat du 24 août 2021 impose que la France arrive à l’objectif “Zéro artificialisation nette” en 2050

De quoi parle-t-on?

1- Zéro Artificialisation Nette (ZAN) des sols : pourquoi et de quoi s’agit-il ?

L’artificialisation des sols  est une cause majeure de l’effondrement de la bio-diversité. En 2019, l’IPBES (qui correspond au Giec en ce qui concerne l’observation scientifique du Vivant, de la biodiversité), lance un cri d’alarme. L’aménagement d’aujourd’hui a beaucoup fractionné les espaces, les éco-systèmes, et cette dégradation entraîne une difficulté voire une impossibilité pour les espèces animales et végétales d’accomplir leur cycle de vie et de se déplacer pour leur survie face au changement climatique.

Soulignons d’autre part que les sols naturels sont des capteurs majeurs de CO2.

On constate actuellement 28000 hectares artificialisés par an, ce qui correspond à 4 ou 5 terrains de foot par heure.

2- Qu’est-ce que le sol ?

Ces observations amènent à changer notre regard sur le sol : essentiellement perçu comme un réceptacle, il est en réalité, selon la définition pédologique « un système écologique dont la complexité se manifeste par une diversité considérable d’organismes, éminemment variable dans le temps et l’espace. »

Il est urgent de prendre conscience « qu’il est le produit de l’altération, du remaniement et de l’organisation des couches supérieures de la croûte terrestre sous l’action de la vie, de l’atmosphère et des échanges d’énergie qui s’y manifestent. » Dans un projet d’aménagement, le tracto-pelle détruit en quelques secondes l’équivalent de centaines d’années de travail à la surface de la Terre. 

Un sol recouvert de bitume est un sol mort.

Rappelons les fonctionnalités du sol : biologique, géochimique (capacité à dégrader la matière organique), hydrogéomorphologique (limite les ruissellements, les inondations)

3- Définition de l’artificialisation par l’Article L.101-2-1 du code de l’urbanisme

« L’artificialisation est définie comme l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique ou son usage.

La renaturation d’un sol, ou désartificialisation, consiste en des actions de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé.

L’artificialisation nette des sols est définie comme le solde de l’artificialisation et de la renaturation des sols constatée dans un périmètre et sur une période donnée. »

Attention ! La séquence ERC : Eviter Réduire Compenser qui est par ailleurs préconisée pour tout projet d’aménagement indique bien que le premier geste est d’éviter toute artificialisation.

Au regard du très long travail de la Vie pour créer des sols singuliers dans leurs qualités et fonctionnalités, on comprend bien que toute action destructrice sur un sol doit être évitée et que la compensation ne se substituera pas à l’original.

4- Objectif national et européen

L’objectif d’absence d’artificialisation des sols est un objectif non seulement national mais aussi européen, cependant la France fait encore ici figure de mauvais élève pour n’avoir pas porté d’attention suffisante à cette problématique. Elle est nettement plus artificialisée que ses voisins : 51 % de plus que le Royaume Uni, 15 % de plus que l’Allemagne. (chiffres de l’AdCF).

La loi de 2016 de reconquête de la biodiversité, puis la convention citoyenne et récemment la Loi Climat-Résilience ont placé ces problématiques de zéro perte nette de biodiversité et zéro artificialisation des sols en bonne place des objectifs à atteindre pour 2050. Ce qui ne signifie pas qu’il faille attendre 2050. Au contraire, la loi oblige à planifier ces objectifs dans les documents d’urbanisme :

– les régions doivent indiquer toute la trajectoire pour atteindre le ZAN en 2050 en divisant par 2 la consommation observée ces 10 dernières années.

– La loi exigera aussi des Maires et Présidents des EPCI de dresser un bilan tous les trois ans sur l’artificialisation, bilan qui fera l’objet d’un rapport.

5- Réfléchir et changer de regard

D’après Philippe Schmit, secrétaire général de l’Association des Inter-communalités de France, cette loi nous amène à réfléchir et changer de regard, notamment sur la logique d’aménagement :

passer d’une logique d’aménagement à une logique de ménagement, c’est à dire, comment prendre soin du territoire.

Il insiste aussi sur le rapport au temps : il s’agit de s’interroger sur la relation qu’on peut faire entre le temps du dérèglement climatique (le GIEC a avancé de plus de 10 ans ses prévisions les plus alarmistes) et les documents d’urbanisme qui visent des stratégies à 20 ans.

L’alimentation est aussi concernée au travers de cette loi. La crise covid nous a montré que la problématique de l’alimentation est de plus en plus présente dans les stratégies territoriales. La relation de la ville à son espace agricole doit changer.

Lectures, webinaires

– Le portail gouvernemental de l’artificialisation des sols:

https://artificialisation.developpement-durable.gouv.fr/

-Vous pouvez suivre gratuitement le replay des 6 webinaires organisés par le CNFPT et l’AdCF sur le sujet dont cet article s’est largement inspiré. S’inscrire sur : https://e-communautes.cnfpt.fr ou

webinaire cnfpt : https://e-communautes.cnfpt.fr/nature-et-environnement/nos-webinaires/webinaires-zan-zone-artificielle-nette-2021-un-livret

– le Cerema : https://www.cerema.fr/fr/actualites/zero-artificialisation-nette-forts-enjeux-leviers-action

– la CAUE 77 : https://www.caue77.fr/content/zero-artificialisation-nette